L’Argent Dette (Money as Debt) est une série de films d’animations produits par l’artiste canadien Paul Grignon entouré d’une équipe de bénévoles. Le documentaire expose de façon détaillée le processus de création monétaire par la dette et l’accroissement permanent du PIB qu’il nécessite. Le premier film date de 2006, le second de 2009 (en même temps qu’une version révisée du premier), le troisième de 2011. Leur succès sur le web est attesté par plus de deux millions de vues et une traduction en au moins 14 langues.
Remarquablement pédagogique, le film a été salué par de nombreuses réactions et aussi quelques critiques. Les deux principales sont :
- Le contenu serait tendancieux et accréditerait la théorie du complot,
- A l’argument d’une perpétuelle fuite en avant de la dette pour rembourser capitaux et intérêts est opposé le postulat que les intérêts seraient remboursés par la création de nouvelles valeurs dans l’économie réelle, générées au moyen des prêts initiaux (argument réfuté par l’auteur dans le 2ème film).
Frédéric Lordon a émis pour sa part une réserve de forme en évoquant la maladresse de présenter de manière sensationnelle la création monétaire ex nihilo, une « révélation disponible dans n’importe quel manuel pour classes de Terminale SES ». Il faut bien reconnaître que l’introduction exagérément théâtrale du « scoop » a de quoi accréditer le soupçon de conspirationnisme. Je dois cependant, à la décharge de l’auteur, témoigner de la difficulté de prétendre s’adresser à tous les publics sans distinction pour y avoir été confronté moi-même. C’est en effet un choix que de vouloir rester accessible au profane dans un effort constant de vulgarisation. Mais, dans le même temps, il s’agit aussi de heurter le moins possible le sens commun académique probablement déjà irrité par l’insolente irruption d’un manant dans leurs cénacles, dans la crainte constante d’engager son crédit en forçant des portes déjà grandes ouvertes pour eux. Le grand écart est souvent à la limite du possible. En l’occurrence, Frédéric Lordon le reconnaît plus loin : « Il faut bien reconnaître que l’idée de la création monétaire ex nihilo est suffisamment contre-intuitive et suffisamment contraire aux représentations spontanément formées par le sens commun en matière monétaire pour justifier l’effet de stupéfaction qu’entraîne presque systématiquement son énoncé ». En admettant donc la maladresse de style, je consentirais néanmoins volontiers toute la clémence requise par une promotion méritée de ce remarquable effort de pédagogie sur un sujet hermétique au plus grand nombre et pourtant au cœur de nos vies.
En guise de mise en bouche, cette courte vidéo du même auteur explique très simplement l’essence de l’argent :
Essence de l’Argent – Un conte médiéval (8 minutes)
La série :