Contributions aux états généraux

Mes contributions aux états généraux des socialistes – septembre 2014.
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Transformation et mondialisation

Comment agir dans la mondialisation ? Quels espoirs, quelles menaces ? Quelles régulations ? Une gouvernance mondiale est-elle concevable et comment la faire advenir ? Quels sont les formes et les moyens d’un véritable universalisme ? Doit-il fonder un nouvel universalisme ?

La mondialisation est souvent présentée comme inéluctable. Elle l’est dans un certain sens, les évolutions démographique et technologique ayant multiplié les besoins d’échanges et de ressources à l’échelle globale. De ce point de vue, elle peut donc être considérée comme fille de la nécessité économique, qui fut de tous temps le moteur de la puissance politique. Ainsi, comme jadis les idées des lumières vinrent à point pour légitimer les appétits bourgeois, la nécessité actuelle forme le substrat sur lequel les possédants ont établi leur domination supranationale. Notre société, comme toutes celles qui l’ont précédées, est le fruit de cette dichotomie intangible : le substrat économique survenant en un temps donné et une classe dominante ayant su l’exploiter à son profit. La nouveauté est que cette dernière, cette fois, a pu établir son pouvoir au dessus des nations et donc de leurs lois, réduisant le jeu politique moderne à un bras de fer entre les possédants mondiaux et des politiques de moins en moins influents sur les décisions, ce dont les électeurs ne sont plus dupes. Toute la menace est ainsi résumée. Les espoirs ? Ils semblent bien minces au regard de l’évolution néo-féodale en cours. D’autant qu’ils se matérialisent pour l’essentiel dans des acquis que le mécanisme capitaliste éloigne inéluctablement d’un nombre croissant de consommateurs, et qui se heurte en tout état de cause au mur infranchissable de l’empreinte écologique. Quelles régulations ? Une gouvernance mondiale est-elle concevable ? Oui, dans le monde des rêves. La gauche aime les visons fantasmées rivalisant de beauté (« Gouvernance mondiale », « universalisme »…), qu’elle rêve de voir réalisées à force de les répéter inlassablement à un public qui nous tourne le dos. Or « Les gens ne croient point véritablement aux choses nouvelles s’ils n’en voient déjà réalisée une expérience sûre. De là vient que tous les prophètes armés furent vainqueurs et les désarmés déconfits » (Machiavel). La classe dominante, au fait de sa puissance, n’a que faire de gouvernance mondiale et fera tout pour l’empêcher, si ce n’est à son profit. La réponse est là où elle fut toujours : dans le rapport des forces. La gouvernance mondiale existera un jour lointain, lorsqu’elle recouvrera une Nation mondiale. Plus proche de nous, la Nation européenne pèsera d’un poids que la France a perdu. Encore faut-il pour cela soustraire l’Europe de l’union économique où la réduisent les lobbies, pour achever le stade ultime de l’intégration : les États-unis d’Europe.

Croissance et social-écologie

Qu’est-ce que la social-écologie ? Comment mettre en œuvre efficacement un développement durable ? Quel contenu nouveau donner à la croissance ? Comment produire, consommer, se déplacer autrement ? Quelle éducation à l’environnement et à sa préservation ? Comment concilier le progrès humain et l’épuisement de la biodiversité ? Comment faire face à la nouvelle fracture environnementale, au cœur de la question sociale ?

Qu’est-ce que la social-écologie ? Une de ces idées qui se veulent neuves par la simple association de deux mots, comme « social-démocratie » ou « social-libéralisme ». Cette posture rhétorique classique est généralement avancée pour tenter maladroitement de combler une absence de vision politique. Comment mettre en œuvre un développement durable et surtout comment le concilier avec la croissance est une question autrement plus pertinente. D’autant plus que celle-ci se heurte en effet à l’épuisement de la biodiversité, ou plus précisément aux limites incompressibles de l’empreinte écologique. Nous avons atteint cet été le « jour de dépassement », ce Jour où la population mondiale a consommé toutes les ressources que la Terre peut produire en un an sans compromettre leur renouvellement, et commence à vivre « à crédit ». Depuis 1986, ce jour est passé du 31 décembre au 19 août et ne cesse de reculer. La réalité est qu’on ne peut à la fois viser la croissance et développer durablement, à la fois produire et préserver l’environnement. La sentence est définitive et aucune torture sémantique ne parviendra à l’assouplir. Ce dont nous avons besoin, c’est d’un nouveau paradigme qui imposera un changement profond de nos modes de consommation. Le « développement durable » implique de faire durer nos produits et non d’en développer tous les jours. Qu’on le veuille ou non, ce nouveau paradigme conduit mécaniquement à une logique de décroissance. Quel contenu nouveau donner à la croissance ? Celui qu’il a toujours eu et que la conscience collective ignore largement, la confondant habituellement avec « l’augmentation des biens de consommation disponibles ». La croissance capitaliste désigne l’augmentation du capital, autrement dit de la grandeur de valeur de la capacité productive. Aucun oxymore improbable ne changera cette évidence : croissance capitaliste et écologie sont définitivement incompatibles. Enfin « la nouvelle fracture environnementale, au cœur de la question sociale » est une formule vide de sens, caractéristique de la langue de bois qu’il convient désormais d’abandonner définitivement. La question sociale implique un développement durable respectueux de notre environnement vital. « Social-écologie » est au mieux un pléonasme. La conciliation du progrès humain et de l’épuisement de la biodiversité passe par le dépassement du modèle libéral au profit du modèle socialiste.

Nation et intégration

Comment définir la nation aujourd’hui ? Qu’est-ce qu’être Français ? Comment réaliser l’intégration des populations immigrées ? Que transmettre aujourd’hui ? Quelle doit être notre culture commune ? Comment la République une et indivisible répond-elle aux attentes des territoires métropolitains, périurbains, ruraux ? La France puissance d’influence, est-ce la référence ?

Définir la Nation est une question centrale, un clivage au cœur même du clivage gauche-droite. Nous constatons aujourd’hui un antagonisme entre deux conceptions : la Nation est-elle un ensemble de repères identitaires issus de l’histoire, de la culture et de la tradition, ou un ensemble de valeurs prétendant assurer la coexistence républicaine de multiples cultures ? La première est généralement vue comme de droite, la seconde de gauche. Soyons clairs : la première est juste, la seconde une erreur. La gauche ne pourra faire l’économie d’une évolution de sa conception en la matière pour prétendre à un avenir. Ernest Renan la définissait ainsi : « Ce qui constitue une Nation, ce n’est pas de parler la même langue, ou d’appartenir à un groupe ethnographique commun, c’est d’avoir fait ensemble de grandes choses dans le passé et de vouloir en faire encore dans l’avenir ». L’erreur de la vision habituelle de gauche est de prétendre opposer un concept, ne reposant par définition sur aucune réalité, à un sentiment d’appartenance profondément ancré dans les esprits. La gauche confond ici la vision projetée d’une chose à construire, comme la république au temps de la monarchie, et une chose existante qu’il convient de comprendre afin de s’en pénétrer. Mais surtout, elle offre un fondement au communautarisme, par essence contradictoire avec la « République une et indivisible ». L’intégration des populations immigrées est possible de deux façons : soit par le libre renoncement à sa culture d’origine et l’adoption de celle de la terre d’accueil, soit par la libre conservation de sa culture d’origine et l’éventuelle intégration à une communauté, garantie par le droit, mais en aucun cas par l’assimilation de cette culture d’origine à une hypothétique culture nationale idéelle. L’idée qui sous-tend cette erreur est à l’évidence une quête d’universalisme humain. Cette quête est légitime, et nul doute que la Nation humaine ne devienne un jour une réalité. Mais elle ne s’accomplira que par l’accrétion progressive des Nations quand leurs cultures respectives la permettront. L’Europe est aujourd’hui au seuil d’une étape dans cette direction : prendre conscience de son unité de civilisation doit nous permettre d’achever le dernier stade de son intégration et l’avènement de notre Nation européenne, qui sera mieux armée pour imposer un nouvel ordre mondial que les « États-nations » actuels et leur concurrence stérile. Elle permettra également une décentralisation accrue vers ses régions. Enfin la « puissance d’influence » n’est pas une référence mais un leurre, en ce qu’elle ne repose que sur un crédit octroyé dont nous ne sommes alors pas maîtres.

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Laïcité et république

Comment « faire société » dans une France tiraillée à la fois par l’individualisme, le consumérisme et le communautarisme ? Comment renforcer le pacte républicain partout et pour tous ? Agir ensemble pour le vivre-ensemble, contre l’antisémitisme et l’islamophobie ? Comment concevoir l’application des principes de la laïcité pour qu’elle ait une force intégratrice ? Comment conjuguer aspiration à l’unité et expression de la diversité – des territoires, des parcours, des structures familiales ?

La France est évidemment « tiraillée par l’individualisme et le consumérisme », étant comme le reste du monde une société individualiste, couramment appelée « libérale » (pour le communautarisme, voir la question « Nation et intégration »). Comment « faire société » dans ces conditions ? On ne peut pas ! Par définition, l’individualisme place les uns et les autres dans une éternelle concurrence, au seul bénéfice des puissants (il suffit de considérer l’effondrement de la représentation syndicale). « Comment renforcer le pacte républicain » dans ces conditions ? En renonçant au totalitarisme libéral, ce qui ne pourra se décider qu’à l’échelle de notre Nation européenne après son avènement. Elle seule sera en mesure d’imposer un modèle économique propre à renforcer le pacte républicain. Celui-ci permettra notamment d’assurer à tous une vie conforme aux exigences minimales de la dignité humaine, en opérant une ré-appropriation publique des moyens de production et d’échanges pour les biens relevant de la satisfaction des besoins fondamentaux. Au delà de l’aspect économique, le pacte républicain reposera sur la cohésion nationale qui suppose un consensus autour de ses valeurs. Les principes de la laïcité y tiennent une place primordiale. Encore faudra-t-il en retrouver une interprétation correcte et revenir des errements de la laïcité « à la française ». La laïcité repose sur la séparation de l’Église et de l’État, autrement dit sur la reconnaissance d’une double incompétence : celle de l’Église en matière séculière, et celle de l’État en matière spirituelle. Comment ce dernier peut-il donc, au nom de la « neutralité religieuse » et sans détenir cette compétence, décider arbitrairement de réduire cette matière à autant de courants d’opinions relégués à la conscience individuelle ? En réduisant ainsi la spiritualité à la sphère privée, l’État émiette la conscience en communautés et se retrouve ainsi officiellement athée, ce qui constitue un cléricalisme de fait, soit le contraire même de la laïcité. L’antisémitisme et l’islamophobie trouvent leur source dans la peur du délitement de notre société et donc du pacte républicain. La liberté de conscience sera mieux intégrée dans une société une et indivisible, dont la religion consacrée par l’histoire est officiellement reconnue comme telle, c’est-à-dire en tant qu’autorité spirituelle, dûment soustraite à l’exercice du pouvoir politique conformément aux principes de la laïcité, et qui a de son côté déjà pris officiellement acte de la sécularisation de notre société et reconnu la liberté de culte.

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Émancipation et progrès

Que doit être une société du « bien vivre » ? Comment donner à chacun les moyens de son émancipation personnelle ? Quels sont les instruments collectifs qui le permettent ? Quelle conception du progrès devons-nous proposer ? Quelles exigences éthiques poser ? Qu’est-ce que le socialisme à l’époque de la mondialisation ? Quelle place pour la culture dans la société et l’existence ?

Une société du « bien vivre » est une société ou chacun, en tant que principal acteur de son propre « bien vivre », peut y trouver les moyens de son accomplissement. Le rôle de la société se limite à supprimer les sources d’entrave. Il est avant tout important de ne pas l’oublier pour se garder du risque de dérive totalitaire : une société ne saurait « donner » mais simplement de pas entraver les « moyens de l’émancipation personnelle ». Même chose pour la place de la culture dans la société. Le principe de « non entrave » repose sur celui de la liberté, et de ce point de vue la première source d’entrave est une conception erronée de la liberté largement diffuse dans l’opinion, et qui trouve sa source dans l’idéologie libérale dominante. Cette dernière a réussi à l’assimiler au « libre-arbitre » qui place chacun dans une compétition pour la survie, et se révèle in fine l’instrument d’oppression le plus efficace que l’homme ait conçu. Le premier instrument de l’émancipation et du progrès, la première exigence éthique, consiste à redéfinir clairement cette notion de « liberté ». La liberté vraie réside dans l’absence de contrainte, ce qui disqualifie la notion de même de compétition et suppose en tout premier lieu de disposer inconditionnellement des moyens d’une vie décente. Le progrès technologique propose désormais suffisamment de biens propres à susciter l’envie et la motivation au travail, sans qu’il soit pour cela nécessaire de mettre en balance les biens et service répondant aux besoins fondamentaux. Une société capable de les assurer et les garantir pour tous de manière inconditionnelle constituera un ciment inébranlable de la cohésion nationale, et seule une société socialiste pourra le permettre. Voilà ce que sera « le socialisme à l’époque de la mondialisation » : la mise ne pratique d’un paradigme qui consiste à concevoir la société comme un tout, et non comme une simple somme d’individus comme veulent le faire croire les libéraux. Il implique de servir le Peuple et non les puissants, et d’assurer à tous la liberté telle que définie plus haut.

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Entreprise et ré-industrialisation

Pourquoi l’industrie française s’est-elle affaissée depuis plus d’une décennie ? Est-ce inéluctable ? Comment renforcer notre appareil productif, industriel, mais aussi agricole ? Quelle doit être notre conception de l’entreprise ? Quel rôle pour les salariés et les partenaires sociaux ? La robotique et le progrès technologique nuisent-ils à l’emploi ? Comment lutter contre la rente ? Le risque est-il une valeur de gauche ?

L’industrie française s’est affaissée parce que la puissance publique l’a laissé faire. Privée de possibilité réelle d’action au nom du dogme suranné de la libre entreprise, elle se trouve réduite à de simples politiques incitatives soumises aux caprices des marchés, en premier lieu celui de l’emploi. La simple question de se demander si cette évolution est « inéluctable » est caractéristique d’une vision de droite. Elle n’envisage en effet cette évolution que comme soumise aux caprices des marchés, sur lesquels on ne pourrait chercher que d’hypothétiques moyens d’influence, en excluant l’idée même de décision politique. Le renforcement de notre appareil industriel est pourtant une impérieuse nécessité politique, afin de réduire nos importations, notre empreinte écologique et notre dépendance économique. Il suppose un volontarisme qui ne pourra sans doute pas s’affranchir de mesures protectionnistes, ce qui soulève la question du rapport de force mondial et plaide sans appel en faveur de l’intégration politique européenne. Dans un tel contexte, la place de l’entreprise est évidemment au service de la Nation : c’est à l’entreprise « d’aimer » la puissance publique et non l’inverse. Les salariés et partenaires sociaux gagneront sans aucun doute à être davantage associés à la puissance publique plutôt qu’à l’entreprise. Peut-être pourrions-nous introduire une distinction inédite entre des « sociétés » d’administration publique encadrant la ressource humaine, et des « entreprises » où la notion même de « personnel » aurait disparu. Ce pourrait être une piste pour concilier la flexibilité de la production, la diversification des activités productives et sociales, et l’indispensable sécurisation des trajectoires individuelles. Le progrès technologique ne saurait nuire à l’emploi et est irréversible en tout état de cause. Quand il permet un gain de productivité, la réponse est la réduction du temps de travail. S’agissant du risque, s’il est souvent une nécessité, il ne saurait en aucun cas être une « valeur de gauche ». Enfin, il faut cesser de maquiller les renoncements par des formules creuses. « Lutter contre la rente » et « lutter contre le capital » sont deux façons différentes de dire exactement la même chose. Le « moyen » de cette lutte-ci tient donc en un seul mot : anticapitalisme.

État et contrat

Quelles doivent être les formes actuelles de la puissance publique ? Comment les mettre en œuvre ? Comment l’Etat peut-il prévenir ? Comment doit-il protéger ? Faut-il donner plus de place au contrat et à l’expérimentation ? Comment mettre la jeunesse au cœur des politiques publiques ? Comment permettre aux collectivités territoriales de porter notre modèle ?

La puissance publique n’a jamais eue que deux formes, telle que Machiavel les a énoncées, et pas une de plus. Partant du principe que toute société est composée de grands qui cherchent à dominer, et d’un Peuple qui ne demande rien, sinon à ne point l’être, les deux formes de sociétés dépendent de ce que le Prince, appelé aujourd’hui « puissance publique », s’appuie soit sur l’un, soit sur l’autre. La puissance publique actuelle, quoi qu’on en dise, s’appuie clairement sur les grands (comme il fut souvent, sinon toujours, par le passé). La « forme actuelle » devrait simplement suivre le précepte que le pénétrant florentin énonça voici maintenant plus de cinq siècles : s’appuyer sur le Peuple plutôt que sur les « grands ». ces derniers étant aujourd’hui mondialisés, officiellement pour des raisons économiques, officieusement pour d’affranchir de la tutelle des « Princes », les moyens de cette mise en œuvre ne reposent que sur le rapport des forces. Les États européens actuels sont trop faibles face à la finance mondiale. Ce ne sera pas le cas des États-Unis d’Europe. Naturellement, cette nécessité de rééquilibrer les rapports de forces mondiaux aux bénéfices des Peuples, représentés par leur puissance publique, implique que l’affaiblissement de cette dernière entraînera nécessairement celle du Peuple. Il convient donc de se garder des projections utopistes comme celle qui prétend affaiblir l’exécutif au bénéfice de la représentation parlementaire. En revanche, un pouvoir exécutif efficace supposera, comme tout pouvoir, un contre-pouvoir à sa mesure. Face aux « grands » mondialisés, celui-ci ne pourra être que populaire. En d’autres termes, une éducation citoyenne digne de ce nom est devenue indispensable. Enfin, une cohésion européenne durable ne pourra s’appuyer que sur des Régions fortes administrées selon le principe de la subsidiarité. Les réponses aux autres questions découlent de ce qui précède.

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Démocratie et représentation

Que peut la politique dans le nouvel âge de la démocratie – une démocratie médiatique, numérique, individualiste, sceptique ? Comment les citoyens peuvent-ils se réapproprier la chose publique ? Comment permettre la participation des citoyens ? Diversifier les formes d’expression et d’engagement ? Réorganiser la démocratie représentative pour qu’elle traduise mieux la diversité de la société française ? Lutter contre la société bloquée et la reproduction des élites ? Quelle place pour les autres dimensions de la démocratie : sociale, territoriale, culturelle ? Comment penser maintenant et agir pour longtemps ?

En quoi l’époque actuelle est-elle supposée être un « nouvel âge de la démocratie » ? Si les moyens changent, les principes demeurent. Qu’un sycophante antique ait utilisé ses cordes vocales, ou un extrémiste actuel les médias numériques, il n’en demeure pas moins que tous deux ont abruti d’âneries leurs auditoires respectifs au grand dam de la démocratie. C’est l’inculture politique et non les technologies modernes qui éloigne les citoyens de la chose publique. L’individualisme est en revanche bien caractéristique de ce « nouvel âge », non de la démocratie (bien qu’il l’influence évidemment) mais économique : individualisme et libéralisme sont deux façons différentes de désigner la même réalité dont le contraire est le socialisme. Le premier a notamment pour précepte de réduire la puissance publique à un rôle minimal, quand le socialisme la place au premier plan. La réappropriation de la chose publique par les citoyens et leur engagement s’effectueront donc naturellement quand celle-ci retrouvera sa place normale, c’est-à-dire la première. La complexité du monde moderne introduit toutefois une situation inédite à l’échelle de l’histoire, qui impose désormais une participation effective et éclairée de la part du plus grand nombre possible de citoyens, afin d’opposer un contre-pouvoir effectif à la nouvelle structure mondiale des puissants. Cela suppose une véritable formation citoyenne pour permettre aux électeurs d’appréhender les enjeux, et qui pourrait également être à la base de la lutte contre la reproduction des élites. Il convient enfin de cesser de se perdre dans des débats d’intellectuels de salon qui exaspèrent les citoyens. Ceux-ci se fichent des « dimensions » de la démocratie (et quel rapport avec la culture?) ou de la sempiternelle « diversité ». De ce dernier point de vue, une démocratie citoyenne ne saurait être « représentative », car prétendre imposer des « critères » de représentativité conduit nécessairement à contredire le choix souverain de ses représentants. « The right man at the right place », c’est tout ce que demandent les citoyens.

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Europe et souveraineté

Comment réorienter effectivement l’Union européenne ? Quels éléments de souveraineté partagée pour réaliser une Europe plus démocratique, plus dynamique, plus solidaire, plus influente sur la scène internationale ? Comment y parvenir malgré le recul de la gauche continentale au Parlement européen ? Comment concevoir ses relations avec les autres puissances régionales du globe – États-Unis, Chine, Russie, continent africain ? Quel partenariat euro-méditerranéen ?

Nous réorienterons effectivement l’Union européenne en terminant le travail d’intégration. Après la zone de libre-échange, l’union douanière, le marché commun, l’union économique et aujourd’hui l’union économique et monétaire, il ne reste plus que la toute dernière étape : les États-Unis d’Europe. Les éléments de souveraineté partagée seront évidemment les fonctions dites régaliennes comme la défense mais surtout la politique économique, afin que les États de l’Union cessent entre eux leur concurrence stérile au seul bénéfice des marchés. Sa nouvelle influence acquise alors sur la scène internationale est une évidence. Le fait qu’elle soit plus démocratique dépendra moins des éléments de souveraineté partagée que des modalités de la représentation nationale (entendons : européenne). Il faudra certainement établir dans chaque Région un mode de scrutin plus personnel et plus proche des électeurs, par exemple sur le modèle de nos législatives, de préférence à la méthode actuelle de constitution des listes. Comment dynamiser l’Europe malgré le recul de la gauche continentale au Parlement européen ? C’est impossible. Il faut donc en premier lieu inverser ce recul. Le changement de mode de scrutin associé à un projet sociétal clair et ambitieux pourront sans nul doute y concourir. Mais il est surtout essentiel que nos concitoyens puissent enfin considérer les élections européennes comme les plus importantes de toutes, afin que la gauche parvienne enfin à en chasser les libéraux. Enfin les relations avec les autres puissances de globe dépendent évidemment de leurs intérêts respectifs propres. Avec les États-Unis, la confrontation sera certainement frontale avec les lobbies financiers ; avec la Chine, nous devrons certainement contrer les effets d’un déséquilibre trop important avec notre économie, qui a notamment conduit à notre désindustrialisation, impliquant un certain protectionnisme ; avec la Russie, la fermeté est évidemment de mise, que ne permet pas l’Europe actuelle ; Avec l’Afrique enfin, nous devrons élaborer un partenariat économique débarrassé des logiques de la concurrence libérale, dans l’objectif purement politique de ré-équilibrer les rapports économiques nord-sud et stopper hémorragie migratoire que, d’une part, l’Europe ne peut absorber indéfiniment, et qui, d’autre part, prive le continent de forces vives.

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État social et service public

Comment moderniser et améliorer l’État social ? Pour l’éducation nationale, le système de santé, la politique du logement, la formation professionnelle, le droit à la sécurité, la prise en compte du vieillissement ou la dépendance. Quelle solidarité intergénérationnelle ?

« l’État social », autrement dit l’État tout court. Il n’y aura d’amélioration possible dans les domaines cités que par le renforcement clair, dans l’esprit de chacun, du rôle central de l’État, ce qui suppose un État sachant répondre présent au nom de la collectivité dès lors qu’un individu en a besoin et le sollicite. Notamment, la prise en compte du vieillissement ou la dépendance implique une implication effective d’une puissance publique de proximité, qui ne se décharge pas de cette responsabilité sur la seule famille face aux appétits privés. Par ailleurs, la situation actuelle des maisons de retraite, qui par leur coût prolongent en fin de vie l’inégalité sociale du temps de l’activité, laissant bien des familles démunies, est un de ces scandales qui rendent illusoire tout espoir de valorisation de l’image d’une puissance publique au service de ses concitoyens. Mais c’est surtout pour le logement que la puissance publique brille par son absence criarde. Premier poste de dépense pour le pouvoir d’achat des plus modestes, rente honteuse pour nombre de propriétaires oisifs, première source d’inégalité sociale, le coût du logement est pourtant l’axe d’attaque le plus prometteur en faveur du pouvoir d’achat. Il implique la prise en charge par la puissance publique d’une politique massive de construction à grande échelle qui réduirait mécaniquement le coût du logement. Un chantier de cette nature est incompatible avec l’offre privée pour deux raisons : d’abord la lutte contre la raréfaction du logement est clairement incompatible avec les intérêts du marché immobilier, mais aussi bancaire (perte de garanties d’emprunt), ensuite seule la puissance publique serait en mesure de lever les réticences aux libérations nécessaires du foncier. Voilà un chantier qui donnerait tout son sens au mot « volontarisme » en matière politique, loin des discours sans lendemain.

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Activité et plein emploi

Est ce qu’il faut une société du plein emploi ou de la pleine activité ? Que serait une société du plein emploi et du bon emploi ? Faut-il une société du plein emploi ou de la pleine activité ? Comment mettre la formation au cœur de la société et de la vie de chacun-e ? Comment répondre au chômage de masse vécu dans les quartiers ?

Le « plein emploi » est un mythe. Non seulement il brille par son absence récurrente depuis des décennies, mais cette situation déplorable obnubile tant nos concitoyens (à juste titre certes) qu’il en oublient la définition libérale. Pour les libéraux, le plein emploi ne serait en effet pas un « emploi pour chacun », comme le profane pourrait le supposer, mais un « taux de chômage durablement ramené sous la barre des 5% » (les 5% en question étant supposés représenter la transition moyenne normale « entre 2 emplois »). 5%, cela représenterait toutefois près d’un million et demi d’actifs. Il est pour le moins difficile d’imaginer un tel nombre « entre 2 emplois ». La définition marxienne « d’armée industrielle de réserve » semble plus conforme à la réalité (à ceci près qu’elle est de moins en moins « industrielle »). C’est donc bien une société de la pleine activité qu’il faut viser (sans abuser toutefois des sempiternelles formules rhétoriques. Qu’est-ce qu’un « bon emploi »?). La pleine activité suppose que chacun trouve une place active dans la société. « L’emploi », au sens courant du terme, n’est qu’une activité parmi d’autres : il ne désigne que la production d’un bien ou service répondant à la demande solvable d’un marché. Si on considère les gains de productivité, ce dernier devrait donc logiquement, dans une société bien faite, décroître avec le temps. Le simple fait qu’il faille en créer témoigne d’une structure économique inadaptée à la réalité moderne, en particulier l’incapacité de la puissance publique a créer d’autres formes d’activités. Dans cette perspective, elle se heurte notamment à la question de leur financement, qui ne saurait évidemment reposer sur l’impôt. L’économie publique devra donc intégrer des produits spécifiques, comme ceux générés par la satisfaction des besoins fondamentaux. Cela suppose évidemment leur soustraction du marché afin d’en conférer le monopole à la puissance publique, ce qui relance inévitablement la question du rapport de force mondial et de l’intégration politique européenne. Les réponses aux autres questions découleront essentiellement de cette mise en œuvre.

Droits et individus

Peut-on dire à la fois « je » et « nous » ? Comment concilier l’extension des droits de l’individu et la solidarité ? Les libertés individuelles sont-elles sans limites ? Parité, lutte contre la pauvreté et l’exclusion, refus des discriminations : quels sont les combats de l’égalité et quels moyens doivent-ils mobiliser ?

« Je » sacrifié à « nous » donne une dictature ; « je » seul dans un désert perd toute existence. La certitude que « je » dépend en en premier lieu de « nous », autrement dit que l’intérêt particulier dépend de l’intérêt général, est la définition même du socialisme, au rebours du libéralisme qui résume l’intérêt général à la simple somme des intérêts particuliers. Le lien entre l’extension des droits de l’individu et la solidarité est précisément ici : le premier dépend étroitement de la seconde. Ce lien fixe de même la limite aux libertés individuelles, qui ne sauraient contrevenir aux exigences de solidarité. Mais cette limite-là n’est pas nouvelle, elle fut énoncée il y a plus de 2 siècles dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. De même, la lutte contre la pauvreté et l’exclusion est débattue dans d’autres questions de la présente consultation. Le refus des discriminations relève d’abord de la loi, et l’arsenal juridique existe déjà, ensuite de l’évolution des mentalités. De ce dernier point de vue, la puissance publique n’a qu’une responsabilité et une seule : veiller aux bonnes conditions matérielles des trajectoires individuelles afin que l’homme puisse révéler ce qu’il a de meilleur en lui, et non ce qu’il a de pire comme quand il est menacé dans son intégrité, physique et morale. Bannissons enfin, encore une fois, ces formules rhétoriques creuses qui, si elles ont un effet, n’ont que celui de nous éloigner des électeurs. « Combats de l’égalité » ne veut rien dire. De même la « parité » n’est pas un combat. Qu’à la rigueur une mesure moratoire en ce sens ne débloque l’accès aux femmes aux instances représentatives, s’il est avéré qu’un obstacle culturel s’y oppose, mais de là à en faire une « valeur », il y un pas. Pourquoi alors ne pas pousser l’obsession de la représentativité jusqu’à son extrême logique, et intégrer tous ses critères comme l’âge, la religion, la CSP, et combien d’autres ? Il ne resterai plus in fine qu’à remplacer les élections par une désignation des représentants par l’INSEE !

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